Scènes de genre et paysages du MAH à Lens

L’exposition de la Fondation Arnaud fait la part belle à ces deux spécialités de la peinture flamande et hollandaise

Présentée à la Fondation Pierre Arnaud (Lens, Valais) jusqu’au 22 janvier 2017, Peintures flamandes et hollandaises du Musée d’art et d’histoire de Genève propose une sélection de scènes de genre et de paysages, dont il est bon de rappeler les racines artistiques et historiques.

L’exposition de la Fondation Arnaud fait la part belle à ces deux spécialités de la peinture flamande et hollandaise

Présentée à la Fondation Pierre Arnaud (Lens, Valais) jusqu’au 22 janvier 2017, Peintures flamandes et hollandaises du Musée d’art et d’histoire de Genève propose une sélection de scènes de genre et de paysages, dont il est bon de rappeler les racines artistiques et historiques.

Au cours du XVIe siècle, la représentation du «pays» et de ses habitants se développe à Anvers dans le milieu de Pieter I Bruegel. Attachée à l’identité flamande, elle adopte deux formes dont les frontières sont mal définies et que l’on désigne alors sous l’étiquette de «paysage». La première se focalise sur les personnages qui tendent à proliférer. C’est elle qu’on rattachera dès la fin du XVIIIe siècle à la scène de genre, définie comme la représentation de la vie quotidienne. La seconde, comme par réaction, tend à évacuer les figures pour se concentrer davantage sur l’évocation de la nature. Elle seule correspond donc à ce que nous appelons aujourd’hui «paysage».

Les scènes de genre

Les formules de la «scène de genre» élaborées au milieu du XVIe siècle par Pieter I Bruegel deviennent de véritables spécialités recherchées par les collectionneurs. Les fêtes villageoises sont régulièrement évoquées. La Noce de village peinte au début des années 1650 par Jan Miense Molenaer, peintre apprécié par les patriciens d’Amsterdam, en est un bon exemple. Elle montre une église, dont l’horloge comportait à l’origine de vraies aiguilles, reliées à un dispositif placé au revers du tableau par un collectionneur genevois à la fin du XVIIIe siècle.

Jan Miense Molenaer, Noce de village, v. 1650–1655. Huile sur bois de chêne, 66.1-66.5 x 87x 1cm ©MAH, photo : B. Jacot-Descombes, 1873-0002
Jan Miense Molenaer, Noce de village, v. 1650–1655. Huile sur bois de chêne, 66,5 x 87 cm
©MAH, photo : B. Jacot-Descombes, inv. 1873-0002

On peut également mentionner les représentations hivernales qui mettent en scène des villageois patinant, une spécialité mise à l’honneur à Amsterdam par Hendrick Avercamp et poursuivie par des peintres tels que les frères Beerstraaten dans un tableau spectaculaire et significatif d’une évolution de la peinture hollandaise vers un style plus rigide.

Le paysage

Le paysage peut quant à lui se subdiviser en deux tendances. La première, vernaculaire, s’attache à représenter l’identité locale. En Flandre, elle est représentée notamment par Frans de Momper et son admirable Vue de Genève (v. 1650-1660). En Hollande, elle comprend des spécialités telles que la marine, l’évocation de l’économie maritime et fluviale. Elle est dominée par Jacob van Ruisdael.

Allaert van Everdingen, entourage de ?, Marine, v. 1660. Huile sur bois, 22.4 x 29.2 cm ©MAH, photo : Y. Siza, inv. CR 0134
Allaert van Everdingen (entourage de ?), Marine, v. 1660. Huile sur bois, 22,4 x 29,2 cm
©MAH, photo : Y. Siza, inv. CR 0134

Ce dernier s’inspire largement de la campagne aux abords de Haarlem et d’Amsterdam, en s’intéressant particulièrement aux effets atmosphériques. Son langage suggestif, qui joue sur les empâtements de la matière picturale, exerce un impact sur des peintures tels Meindert Hobbema, Paysage de forêt (vers 1660-1665). Il connaîtra un succès particulier sur le marché du XIXe siècle, en inspirant John Constable, l’«école de Barbizon» puis les peintures «réalistes».

Meindert Hobbema, attribué à, Paysage de forêt, v.ers 1660 – 1665. Huile sur toile, 94 x 126,6 cm ©MAH, photo : inv. 1942-0017
Meindert Hobbema (attribué à), Paysage de forêt, v. 1660–1665. Huile sur toile, 94 x 126,6 cm
©MAH, photo : B. Jacot-Descombes, inv. 1942-0017

La seconde tendance du paysage, dit italianisante, évoque une campagne arcadique, idéalisée. Elle est introduite en Hollande au début des années 1640 par Jan Both qui, de retour de Rome, diffuse le modèle classique de Claude Lorrain, peintre établi à Rome et dont l’impact sera rapidement ressenti dans toute l’Europe. Caractérisée par une clarté de la composition, un dessin net et une lumière aussi chaude qu’enveloppante, elle est représentée entre autres par le Jeune chasseur, dont le monogramme «AC», longtemps considéré comme celui d’Albert Cuyp, doit en réalité appartenir à son élève Abraham van Calraet. À la fin du XVIIe siècle, elle aboutit dans des paysages arcadiques, comme celui d’Adriaen de Hennin, caractéristique d’une esthétique plus académique. Son succès commercial culmine autour de 1700 et se reflète dans les collections princières de cette époque.

Frédéric Elsig, professeur associé en Histoire de l’art à l’Université de Genève et commissaire de l’exposition

Ce texte est tiré et adapté du livret accompagnant l’exposition L’Art et ses marchés. La peinture flamande et hollandaise XVIIe et XVIIIe siècles (MAH, 2009-2010).

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