Patrimoine en danger

Neuf objets issus du trafic illicite présentés au MAH

Pour quelques mois, le Musée d’art et d’histoire présente neuf objets archéologiques de grande importance pour l’histoire de leurs pays d’origine (Syrie, Yémen et Libye), issus du trafic illicite de biens culturels et confisqués par le Ministère public de la République et Canton de Genève.

Neuf objets issus du trafic illicite présentés au MAH

Pour quelques mois, le Musée d’art et d’histoire présente neuf objets archéologiques de grande importance pour l’histoire de leurs pays d’origine (Syrie, Yémen et Libye), issus du trafic illicite de biens culturels et confisqués par le Ministère public de la République et Canton de Genève.

La guerre, lorsqu’elle éclate, est malheureusement synonyme de nombreuses victimes, militaires certes, mais civiles également. Dans cette situation, il peut paraître indécent de se soucier de la conservation du patrimoine historique. Pourtant, si la plupart des pays du monde consacrent des moyens conséquents à la mise en valeur du patrimoine, malgré le contexte économique instable, c’est bien que la prise de conscience du rôle culturel, social et économique des musées et monuments est sociétalement admise.

Il n’y a pas de peuple sans passé. Toute cohésion sociale repose sur un héritage commun. Dès lors, la préservation du patrimoine doit être prise en compte même durant la phase offensive des combats, afin de préparer le retour à la paix et à la réconciliation. Genève a donné le ton en 1939. Alors que la guerre civile était à son paroxysme en Espagne, le Musée d’art et d’histoire accueillait «l’Exposition des chefs-d’œuvre du Prado». Il répondait ainsi aux accords de Figueras «en permettant au bien commun de demeurer celui de la nation espagnole» à l’abri du conflit et des risques de dommages irréparables.

Chaque conflit naissant apporte son cortège d’horreurs et d’atteintes irréversibles au patrimoine d’un peuple. On pense à la Syrie mais a-t-on également oublié l’Afghanistan? S’est-t-on penché sur le sort des musées en Angola? Les exemples de musées et monuments pris dans la tourmente de guerres civiles ou non qui n’ont pu être sauvés sont nombreux.

À peu de distance des marchands d’armes qui se pressent aux abords des pays pris dans le chaos, des marchands d’œuvres d’art veillent. Ils révisent leurs fichiers clients et s’assurent à l’intérieur des complicités nécessaires pour, le jour venu, piller sites et musées soigneusement repérés.

Ce processus est parfaitement connu. Pourtant, depuis quelques années, les réactions à ce scandale répété se font de plus en plus entendre. Les professionnels s’organisent afin de repérer les objets qui pourraient provenir de ce trafic, en collaborant avec Interpol et les polices nationales. Les douaniers font un travail de grande qualité et la justice joue son rôle. La coordination étroite entre tous ces acteurs est la condition sine qua non du succès. L’intérêt des médias qui relaient régulièrement ce travail accompli pour la sauvegarde de la mémoire, permet de sensibiliser la société à cette spoliation de l’histoire.

La multiplication et l’intensité des guerres civiles au Moyen-Orient, berceau de la civilisation occidentale entraîne des dommages irréparables au patrimoine de nombreux pays. Personne n’a oublié les images marquantes de la destruction de sites et de musées en Syrie ou au Yémen. Au-delà de la portée symbolique de ces destructions, il s’agit tout d’abord d’un commerce lucratif qui alimente le marché européen et nord-américain. Les objets archéologiques présentés à la presse, au Musée d’art et d’histoire, le 14 mars 2017, et qui seront visibles par le public durant plusieurs mois en sont une illustration.

Objets d’une valeur historique et culturelle insigne, provenant de Syrie, du Yémen et de Libye, ils ont été saisis par l’Inspection de douane Genève-Routes (Administration fédérale des douanes) et confisqués par le Ministère public de la République et Canton de Genève. Ces œuvres sont temporairement déposées au Musée d’art et d’histoire pour étude et présentation au public. L’aspect pédagogique, que nous espérons dissuasif, d’une telle présentation s’inscrit dans le vaste combat des musées pour la conservation de la mémoire et l’écriture de l’histoire, ce qui demeure sa première mission.

Au gré de l’évolution de la situation internationale et des demandes de restitution des pays sources, il appartiendra le moment venu aux autorités compétentes d’organiser la restitution.

Pour en savoir plus:

Patrimoine en danger: le Yémen
Patrimoine en danger: la Syrie
Patrimoine en danger: la Libye

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