Un Comité de déontologie de proximité

Des principes aux pratiques

L’adoption d’un Code de déontologie professionnel par le Conseil international des musées (ICOM), en 1986, a marqué une étape clé dans la reconnaissance d’un besoin d’autorégulation de l’action des professionnels de musée. Cette recherche de préceptes déontologiques pour guider l’exercice de la profession émergeait de l’éthique des acquisitions adoptée en 1970 par l’ICOM, dans le sillage de la Convention UNESCO de 1970 sur la prévention du trafic illicite et le retour des biens culturels.

L’adoption d’un Code de déontologie professionnel par le Conseil international des musées (ICOM), en 1986, a marqué une étape clé dans la reconnaissance d’un besoin d’autorégulation de l’action des professionnels de musée. Cette recherche de préceptes déontologiques pour guider l’exercice de la profession émergeait de l’éthique des acquisitions adoptée en 1970 par l’ICOM, dans le sillage de la Convention UNESCO de 1970 sur la prévention du trafic illicite et le retour des biens culturels.

La longue et complexe révision du Code de déontologie de l’ICOM, initiée dès 1998 et achevée en 2004, a permis de développer des sujets présents au cœur de l’actualité (trafic illicite, restitution, restes humains, etc.) et de les inscrire dans la pratique des professionnels. Le Code est ainsi devenu un outil consultable au quotidien tout en demeurant une référence ultime, ayant comme vocation de gouverner la conduite professionnelle et de tracer le périmètre des interventions et des activités développées par les responsables et les spécialistes en charge des musées et du patrimoine. Ceux-ci sont les garants et les gardiens du Code de déontologie de l’ICOM.

Des principes aux pratiques

Si, par essence, la déontologie demeure un corpus de référence pour une communauté professionnelle, les principes du Code de déontologie de l’ICOM peuvent également inspirer les institutions ou les autorités de tutelle en charge des musées, qui ont la faculté de renforcer l’effectivité du Code et de l’inscrire plus fortement dans la réalité quotidienne des musées.

C’est ce défi qu’a relevé la Ville de Genève en 2009, sous l’impulsion de son Conseiller administratif à la culture, et que poursuit aujourd’hui son successeur. Jean-Yves Marin, directeur des MAH et moi-même avons ainsi été chargés de mettre en place un Comité de déontologie des musées de la Ville de Genève, composé de personnalités suisses et internationales. Aux côtés du magistrat chargé de la culture à la Ville de Genève, ce comité réunit des personnalités dans différents domaines d’expertise, qu’il s’agisse de conservateurs ou directeurs de musées genevois et suisses, de représentant du comité national suisse de l’ICOM, d’experts en droit suisse et en droit international, ou de personnalités ayant occupé des fonctions au sein d’organisations internationales dans le domaine de la culture et des musées.

Le code de déontologie comme outil d’évaluation

Le but de ce comité est d’étudier et d’évaluer les modes d’acquisitions passés et présents et de proposer, si nécessaire, d’éventuelles restitutions ou coopérations. L’enjeu est d’initier une politique de transparence sur les conditions de conservation et de constitution des collections des musées genevois, car ce qui hier apparaissait comme acceptable peut maintenant être analysé, en fait, comme une appropriation par un musée prédateur. Il ne s’agit ni de diaboliser, ni de faire preuve d’angélisme, mais de s’assurer que les musées de Genève inscrivent leur politique d’acquisition dans l’esprit des conventions et des normes internationales qui protègent le patrimoine. En ce sens, il n’appartient pas à ce comité de se substituer aux organes juridictionnels qui pourraient statuer sur la légalité du processus d’acquisition; il lui revient de poser la question de la légitimité des modes de constitution de certaines collections et de les évaluer à l’aune des préceptes du Code de déontologie de l’ICOM.

Ce comité apporte une expertise aux conservateurs genevois et à leur autorité de tutelle. Face à des situations parfois complexes, le comité leur permet de solliciter les conseils des personnalités investies dans le domaine du patrimoine et des musées et de prendre des décisions éclairées par les avis ou les recommandations recueillis. Les travaux entrepris dans le cadre du Comité de déontologie convergent vers un même objectif: poser les conditions et le cadre de référence pour une conservation durable des collections, et guider les politiques d’acquisition conformément à cet objectif. L’expérience de ce comité montre que les générations de conservateurs qui se sont succédé ont agi avec cohérence et lucidité et que les scories de l’histoire muséale peuvent être corrigées sans drame.

Le Comité de déontologie des musées de la Ville de Genève n’a que deux années d’existence mais les résultats obtenus – la clarification du statut de collections en dépôt, le renforcement du partenariat avec les responsables de l’archéologie de terrain pour la gestion et l’étude des collections archéologiques, l’officialisation de la restitution d’une tête maori… – ainsi que les changements de mentalité qu’il a induit, nous laissent penser que sa création était nécessaire et que les évolutions en cours viendront s’ancrer dans le document de référence sur la politique d’acquisition que la Ville de Genève souhaite adopter prochainement pour l’ensemble de ses musées. Les travaux d’un tel comité doivent s’inscrire dans la durée afin de constituer progressivement un corpus de référence en regard de l’histoire et de la constitution des collections des musées. Nous ne pouvons que souhaiter la multiplication, à l’échelon territorial, de tels comités. Il y va de la légitimité et de l’avenir des musées.

©ICOM 2012

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