Le MAH soigne son accueil des classes spécialisées
Depuis plusieurs années, le Musée d’art et d’histoire mène une politique d’accessibilité qui, en 2019, lui a valu l’obtention du label «Culture inclusive». Dans ce cadre, le musée propose depuis septembre 2018 un programme de visites à destination des classes spécialisées de primaire, grâce au généreux soutien de la Fondation genevoise de bienfaisance Valeria Rossi di Montelera.
Un public cible
Les classes spécialisées accueillent des élèves en grande difficulté scolaire, présentant parfois des handicaps et des besoins éducatifs particuliers. Ces groupes ont peu l’habitude des visites au musée, car celles-ci peuvent se révéler peu adaptées à ce type de public. En effet, plusieurs enseignant(e)s ayant participé au programme ont fait part de leurs mauvaises expériences lors de précédentes sorties dans divers musées : les élèves se désintéressaient vite des visites au discours peu adapté qu’ils trouvaient ennuyeuses. L’idée était donc de leur offrir un accueil sur mesure, tenant compte de leurs besoins spécifiques, pour qu’ils puissent découvrir le musée comme les autres élèves du primaire.
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Les trois visites de ce programme, possédant chacune leur attrait particulier, sont d’ailleurs proposées à l’ensemble des classes de primaire, spécialisées ou non. Leur différence réside dans l’approche et non dans les contenus culturels. L’expérience a en effet montré que les élèves de classes spécialisées étaient parfaitement à l’aise avec les thèmes et les éléments de savoir abordés avec les autres classes. En revanche, une interaction beaucoup plus poussée entre médiateur et élèves est fondamentale: elle permet à ces groupes une participation maximale qui garantit leur intérêt et leur attention.
L’approche tactile
La première visite est celle de la salle des Armures. Outre l’aspect historique dont les élèves sont particulièrement friands – quel enfant n’aime pas les chevaliers ? –, elle revêt l’avantage de comporter une partie tactile. Les élèves ont en effet la possibilité d’essayer un gantelet et de soupeser une cotte de maille. Cette approche sensible, déjà développée au MAH dans le cadre d’autres visites inclusives ajoute du dynamisme, renforce la participation, retient l’attention et enrichit l’expérience de visite. L’aspect tactile occasionne aussi quelques moments cocasses (le poids de la cotte de maille peut notamment surprendre), tant pour les enfants que pour les adultes.
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Le conte
Intitulée Mythes et monstres, la deuxième visite propose de retracer l’histoire d’affrontements entre certains des plus grands héros et monstres de la mythologie grecque. Basée sur cinq pièces du musée, elle permet aux élèves de (re)découvrir notamment Héraclès, Ulysse, Thésée, le minotaure ou Polyphème le cyclope. L’observation des objets s’appuie sur des moments de conte qui rendent la visite particulièrement accessible. Les élèves se laissent facilement emporter par les mythes, leurs héros et leurs monstres. Ils participent volontiers, en posant des questions, en répondant à celles du guide, parfois en complétant les propos de ce dernier. Comme dans les autres classes de primaire, ces élèves ont souvent des connaissances en mythologie grecque, qui leur viennent de l’école, grâce à la lecture en classe d’ouvrages tels Le Feuilleton d’Hermès de Murielle Szac, ou de leur culture personnelle. Ils sont ainsi très enclins à participer en retrouvant leurs héros préférés et à découvrir de nouvelles histoires pour parfaire leur savoir.
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Le parcours-découverte
La dernière visite du programme est consacrée à la Maison Tavel, la plus ancienne demeure de Genève, située en Vieille Ville, face aux fameux canons. L’attrait de la visite est ici celui de la découverte, dont l’objet principal est la maison elle-même, avec son allure de château et les ambiances très particulières de ses différents espaces. D’étage en étage, les élèves partent en quête des mystères de la vieille bâtisse, véritable machine à remonter le temps. Le passage dans le coffre-fort des Tavel, le face-à-face avec les têtes sculptées ou la découverte stupéfiante du Relief Magnin, cette immense maquette de la Genève de 1850, sont toujours des moments forts et très appréciés des élèves. La capacité du guide à envelopper de mystère et à scénariser la visite contribue naturellement à son succès, mais la magie du lieu fait beaucoup !
Un succès à pérenniser
Quel bilan tirer de ce programme à destination des classes spécialisées ? La totalité des enseignant(e)s ayant tenté l’une ou l’autre de ces visites sont revenu(e)s au moins une fois pour en faire une deuxième et la très grande majorité des classes ont effectué les trois visites.
Après un démarchage direct de quelques enseignants identifiés, les classes participantes disent avoir eu connaissance du programme par le bouche-à-oreille. La promotion de ce type d’action est en effet compliquée, car il est difficile pour le musée de toucher les destinataires par une voie unique.
Les enseignant(e)s, parfois réticent(e)s à emmener ces élèves au musée par crainte des visites trop techniques ou peu adaptées, ont tou(te)s relevé l’accessibilité du programme et le plaisir des enfants à découvrir œuvres artistiques et objets historiques. Les trois propositions sont en outre très différentes les unes des autres, par le type d’objets vus et par l’approche, et donc très complémentaires. Elles constituent une trilogie de découvertes pour des élèves qui ont peu la chance d’effectuer ce genre de sorties et qui se disent ravis d’en profiter.